Après notre enquête sur les conséquences de la piétonisation du centre-ville de La Rochelle et la mise en place du stationnement payant, Christophe Bertaud et Olivier Prentout ont accepté de répondre à nos questions sur le sujet et d’expliquer la politique de la ville sur la voiture ainsi que sur la dynamique du centre de la Rochelle.
Christophe Bertaud, 2ᵉ adjoint au maire en charge du commerce, et Olivier Prentout, adjoint en charge des mobilités urbaines et de l’aménagement des espaces publics, ont accepté de répondre à nos questions concernant les mesures mises en place dans le centre de la Rochelle et leurs conséquences sur le commerce. Cela fait suite à notre enquête sur les impacts de la piétonisation du centre-ville et du stationnement payant, disponible en cliquant ICI.
"Il n'y aura plus de changements significatifs en centre-ville"
« Pendant la période des fêtes, le budget de la ville a augmentée de 130 000€ par rapport à l’année dernière et il y avait beaucoup plus de monde en ville. Les parkings de Verdun, du Vieux-Port et de l’Esplanade étaient pleins les jours avant Noël et le sont régulièrement durant les week-ends. De plus, il y avait de la place en ville, et nous avons mis en place la gratuité des bus plusieurs samedis de décembre, ainsi que l’expérimentation d’une navette de 22 places qui circulait dans le centre-ville et qui a été un succès, notamment auprès des jeunes, des personnes de plus de 50 ans et de celles ayant des difficultés à marcher » explique Cristophe Bertaud sur la période de Noël et l’expérimentation d’une navette dans le centre-ville « Il y a eu 1 712 usagers sur la période des fêtes, et en moyenne 8 places assises sur 10 étaient utilisées. Ce premier test permettra ensuite une utilisation plus large de la navette dans le centre-ville à partir de l’été prochain. On peut regretter cependant qu’elle n’ait pas été mise en place plus tôt, lors de la mise en place de la zone apaisée, mais il y avait un problème de calendrier et de renouvellement du réseau ».
Pour le second adjoint au maire, cette navette pourra permettre aux personnes à mobilité réduite ou ayant du mal à se déplacer de, par exemple, se garer au parking de l’Esplanade des Parcs, puis prendre la navette à Dauté pour rejoindre le centre-ville. Concernant l’arrivée « brutale » du stationnement et de la piétonisation, il rappelle qu’il y a eu deux années d’expérimentation avec l’installation progressive de bornes et la présence d’agents circulant dans les rues. « Ça n’a pas été fait du jour au lendemain. »
Olivier Prentout justifie l’extension du stationnement payant dans le centre-ville : « Les gens qui venaient travailler quotidiennement ont pu trouver d’autres moyens pour stationner, par exemple grâce aux transports en commun. Et pour rappel, une heure de stationnement coûte bien 2,50 €, sans compter les parkings. » Concernant la question d’un parking supplémentaire, l’adjoint au maire répond : « Les gens seront toujours là pour critiquer quand le parking sera plein et réclamer qu’il faut en construire davantage, ou à l’inverse, quand il n’est pas rempli, dire qu’il ne fallait pas en faire. De plus, il y a une heure gratuite de stationnement dans les parkings de la ville, où il y a généralement de la place en semaine. Une heure, ça suffit à beaucoup de personnes, et à Verdun, on voit qu’il y a beaucoup de tickets gratuits justement. Sur plusieurs parkings comme l’Encan ou le Vieux-Port, le stationnement est gratuit le soir pour venir dans les restaurants […] Il faut influer sur le comportement des habitants par rapport à la mobilité, par exemple en utilisant le bus. Dès cet été, il y aura plus de fréquences pour la 2ᵉ et la 3ᵉ couronne, ainsi que l’ouverture prochaine de la ligne Illico 5. Encore une fois, on n’interdit pas de venir en voiture, mais il faut un changement d’habitude, par exemple en la stationnant dans les parkings relais puis en prenant le bus, ou en utilisant des trottinettes qu’on met dans le coffre pour venir en ville. Il y a plein de solutions. »
L’élu, qui ne sait pas encore s’il souhaite briguer un nouveau mandat d’adjoint en 2026, rappelle également que lorsqu’on doit venir récupérer un colis ou un article dans une boutique du centre-ville en voiture, il est possible de passer les bornes du centre-ville pour prendre son achat dans une boutique. De plus, il rappelle que La Rochelle n’a pas mis en place de zone à faibles émissions avec une vignette Crit’Air comme l’ont fait d’autres villes, qui ont ainsi « ostracisé une partie des habitants. Nous sommes engagés dans ce territoire à réduire nos émissions sans pour autant avoir des mesures radicales comme celles-ci ». Et selon lui, cela fonctionne, comme l’attestent les résultats de fréquentation des transports en commun et des vélos, entre autres.
Olivier Prentout tient également à préciser qu’il « n’y aura plus de changements significatifs en centre-ville » sur la circulation d’ici la fin du mandat, mais qu’ils étudieront les situations particulières afin de les améliorer. Enfin, lorsqu’on demande à l’élu chargé des mobilités si la ville mène une politique anti-voiture, comme l’accusent leurs opposants, il répond : « J’ai une voiture, je l’utilise quand c’est nécessaire, même si j’aime beaucoup le vélo. Par exemple, pour le transport de charges lourdes, il n’y a pas d’alternative, que ce soit en vélo ou en bus. »
Un taux de vacance commerciale dans le top 5 des villes en France
Concernant la situation des commerçants dans le centre-ville, Christophe Bertaud se veut rassurant et rappelle que La Rochelle a un taux de vacance commerciale inférieur à 4 %, et qui se situerait réellement autour des 2 %. Un observatoire du commerce a été mis en place à La Rochelle, qui réalisera un bilan avec des données chiffrées sur le chiffre d’affaires, la fréquentation, etc. « Je pense qu’on est dans le top 5 des villes françaises pour le taux de vacance commerciale, ce qui montre un dynamisme. Certes, certaines rues, comme celle du Minage, ont toujours souffert d’être à l’extrémité du centre-ville, ce n’est pas une nouveauté. C’est pour cela que les commerçants ont une redevance inférieure. Je pense même que le fait que ce soit piéton autour du marché amène plus de gens qu’il y a 10 ans ».
A propos de la piétonisation de la rue Saint-Yon, les deux adjoints au maire rappellent qu’il y a eu un choix de créer un grand cheminement commerçant qui va de la Grande Horloge jusqu’à la rue du Minage. « La place du marché, la rue Saint-Yon font partie de cette stratégie. On veut que cet axe, qui part de l’îlot de la Caille jusqu’au marché, soit piéton. On n’octroiera aucune terrasse sur la rue Saint-Yon, excepté pour le tabac de la Civette. On a une stratégie de garder des commerces de service à la personne. Il faut trouver un juste équilibre afin de ne pas avoir qu’un centre-ville avec des touristes et Airbnb. […] Il y a une rotation des franchises au niveau du cœur de ville. Des commerces de bouche reviennent même en centre-ville. On est certes un territoire touristique, mais avec des commerces qui restent à l’année. » Il explique également qu’il faut sanctuariser et sécuriser l’espace public, comme on a pu le voir avec l’actualité dramatique des attaques à la voiture en Allemagne et à La Nouvelle-Orléans. Ainsi, deux nouvelles bornes ont été relevées rue Amelot et quai Valin pour protéger les promeneurs.
"Demain, le grand chantier, c'est le marché"
Concernant les futurs grands chantiers que pourrait connaître le centre-ville, Christophe Bertaud indique : « Demain, le grand chantier, c’est le marché. Nous travaillons actuellement sur l’analyse des besoins fonctionnels pour la place du marché. Une fois qu’on aura tous les documents et règlements d’urbanisme, on pourra lancer un programme de réhabilitation du marché, mais il faudra trouver une solution annexe pour les commerçants. Il y a un budget de 10 à 15 millions pour ce projet, et 1,5 million d’euros pour reloger les commerçants. » Le second adjoint au maire assure qu’ils travailleront sur ce dossier jusqu’à la fin du mandat, qui est un objectif prioritaire pour le centre-ville.
Pour conclure, les deux élus souhaitent rappeler qu’il y a bien toujours de la place dans le centre-ville de La Rochelle et qu’il existe une multitude de moyens pour s’y rendre de manière rapide et économique.