Le dernier conseil municipal de l’année 2024 à La Rochelle s’est tenu ce lundi 16 décembre, donnant lieu à de vifs échanges entre l’opposition municipale et la majorité, dans une salle comble rassemblant plusieurs syndicats du CCAS et de la police municipale, en grève depuis plusieurs semaines.
Le dernier conseil municipal de l’année 2024 a eu lieu ce lundi 16 décembre à La Rochelle, dans un contexte social très compliqué à gérer pour la mairie, entre la question du CCAS (Centre communal d’action sociale) et celle de la police municipale, deux organisations régulièrement en grève ces dernières semaines. Avant le conseil municipal, devant les élus, une élue de Sud a pris la parole afin d’alerter sur la fusion du service RH du CCAS en lien avec celui de la ville et de l’agglomération. La syndicaliste a rappelé l’opposition de l’ensemble des représentants du personnel du CCAS à cette fusion et a demandé à ne pas engager l’organisme social sur la voie de la marchandisation des services à la personne. De leur côté, les grévistes de la police municipale étaient dehors, dans la cour de l’hôtel de ville.
Les échanges ont ensuite débuté après une remarque du maire sur la nomination du Premier ministre, qu’il a félicité et interpellé sur la question du budget 2025, étant donné qu’il est également maire de Pau, une ville de taille comparable à La Rochelle.
Jean-François Fountaine a évoqué dans un premier temps la police municipale, secouée par un mouvement social concernant l’augmentation des salaires. Ce dernier a réaffirmé son respect et sa reconnaissance pour ce métier, mais s’est également dit « déçu » par le comportement de certaines personnes qui ont utilisé des véhicules du service dans le cadre du mouvement social. Il a également indiqué que les demandes étaient importante et qu’elles ne pouvaient pas être supportées par le budget municipal, malgré la publication d’un décret durant l’été permettant l’augmentation des policiers municipaux, comme l’a rappelé l’élu chargé des ressources humaines et des finances, Thibault Guiraud.
L'augmentation des salaires de la police municipale au cœur du débat
Thibault Guiraud ajoute que trois représentants ont été reçus par le maire avec des demandes « légitimes ». Il a ainsi rappelé que les policiers municipaux de la catégorie C sont les agents les mieux payés dans cette catégorie et ont déjà bénéficié de deux revalorisations. Par ailleurs, ils représentent la cinquième masse salariale de la collectivité. L’adjoint au maire a indiqué que les discussions se poursuivaient et qu’un accord avait été trouvé, avec trois syndicats de la police municipale qui étaient favorables à la proposition et un qui s’est abstenu, ce qui pourrait calmer le mouvement social en cours depuis plusieurs semaines dans la police municipale.
C’est alors que Jean-Marc Soubeste a rappelé la crise sociale qui traverse différents services de la ville depuis des mois, en soulignant que les policiers ne bénéficient pas d’avantages, mais de « rattrapages », car ils auraient été pénalisés pendant près de 20 ans. L’écologiste s’interroge également sur le changement de mission de la police municipale et estime qu’il faut reconsidérer leurs rémunérations.
Le conseiller municipal du Renouveau, Franck Coupeau, a également remarqué que l’on est bien loin de la norme de un policier municipal pour 1 000 habitants, un objectif qui accuse donc un retard considérable. Il en a également profité pour aborder un autre sujet, à savoir le CCAS, dont de nombreux employés étaient présents ce soir dans le public. Il indique qu’il n’y a pas eu d’augmentation pour la subvention du CCAS jusqu’en 2022, et que ce métier est en tension et compliqué, tout comme celui des policiers municipaux. Il dénonce également la fusion du service des ressources humaines du centre et se demande si cela correspond vraiment aux attentes du CCAS (Centre communal d’action sociale), vu la situation.
Le financement du CCAS, un sujet compliqué
Le conseiller municipal Michel Tillaud s’est également emporté vivement contre la majorité municipale et contre le discours de Thibault Guiraud sur le salaire des policiers municipaux. Il a rappelé les missions confiées aux policiers municipaux, qui sont confrontés à des personnes parfois difficiles à gérer, ainsi qu’à la gestion d’une arme létale. Il a dénoncé un salaire insuffisant au vu des responsabilités et du travail complexe, avant de faire un parallèle avec les employés du CCAS et leur traitement : « Je n’accepte pas ; vous faites une erreur, ce sont vraiment des professionnels qui méritent de la reconnaissance. »
Des propos qui n’ont pas plu à l’élue de la majorité Marylise Fleuret-Pagnoux, qui s’est emportée : « C’est scandaleux ce que vous venez de dire. » Elle a rappelé que pour les services d’aide à domicile qui sont gérés par le CCAS et qui sont au cœur des débats, il n’y avait pas que les communes qui les géraient, mais aussi le département. La conseillère municipale a expliqué : « Pour les bénéficiaires de l’aide sociale, le département propose de porter le prix de journée à 27 €, alors que le coût est de 34 €. » Elle a demandé aux syndicats de préciser que le département est également responsable de la situation.
Thibault Guiraud a surenchéri en demandant une réponse à Michel Tillaud, qu’il a accusé de faire un sketch, ce à quoi ce dernier a rétorqué : « C’est vous, madame, qui êtes scandaleuse de dire cela, et je ne suis pas dans un sketch, j’ai simplement dit que c’était scandaleux, » visant les propos de Marylise Fleuret-Pagnoux.
Un discours qui a agacé le maire de La Rochelle, Jean-François Fountaine, qui a défendu son adjointe, rappelant qu’elle avait lancé sa carrière en politique sous Michel Crépeau, et en rétorquant : « Quand vous aurez fait le dixième de son travail, vous pourrez faire ce que vous voulez. »
Nadège Désir, élue du Renouveau, a, de son côté, constaté une détresse sur le lieu de travail et l’absence de réponse ou de dialogue : « On attend que le torchon prenne feu pour agir. Cela fait des années qu’on reçoit des demandes des agents du CCAS. Il faut qu’on arrête de parler et qu’on agisse. Je voudrais bien qu’on retire nos casquettes d’élus, qu’on aille dans les rues, dans les foyers, s’occuper des personnes âgées pour voir à quel point ces métiers sont difficiles. Ma maman a été auxiliaire de vie, je sais très bien à quel point c’est difficile. Elle a 67 ans, elle est cassée par la vie. »
Elle s’interroge sur la politique qui sera menée sur le social et rappelle que le CCAS ne peut pas être rentable, un avis partagé par le maire concernant la rentabilité.
Un audit du CCAS en attendant celui de la cour régionale des comptes
Le maire de La Rochelle a également indiqué qu’il avait été voté un budget du CCAS en déficit et qu’il était en attente d’un rapport de la chambre régionale des comptes sur le CCAS, comme le prévoit la réglementation. Cette procédure, souhaitée par Jean-François Fountaine, a été retardée après une erreur administrative. Le rapport ne pourrait donc être présenté que dans un an et demi. En attendant, il se justifie en précisant qu’un audit est en cours avec un cabinet spécialisé, dont le rendu doit être effectué d’ici la fin de l’année sur la situation budgétaire du CCAS, en rappelant que les résultats seront communiqués de manière transparente aux élus et aux personnels.
Franck Coupeau, du Renouveau, appelle à organiser des états généraux concernant le CCAS, tandis que sa collègue Aya Koffi rappelle que « le CCAS est une institution » ayant pour mission de venir en aide aux plus vulnérables. Elle s’interroge sur le transfert du service d’aide à domicile pour les personnes âgées à une organisation externe afin de « noyer le déficit ».
Le maire se défend en soulignant l’effort de La Rochelle, affirmant qu’aucune autre ville en France n’a fait autant, ce à quoi l’opposition rétorque que rien n’a été fait pendant 11 ans. Une subvention de 11 millions d’euros sera probablement allouée l’an prochain, indique le maire, en mentionnant la progression du financement du centre social ces dernières années. Une avance de trésorerie de près de 1,5 million d’euros pour le CCAS a par ailleurs été votée à l’unanimité.
"Je pense que je vais démissionner si cela arrive"
Plusieurs employés du CCAS, notamment des syndicats Sud et de la CGT, étaient présents ce soir. Parmi eux, deux aides à domicile ont partagé leurs craintes en cas de privatisation du service, notamment concernant la précarité, dans un métier qui est féminin à près de 90 %. « Si la ville donne la gestion de l’aide à domicile, on perd tout, et je pense que je vais démissionner si cela arrive, » indique l’une des deux employées du CCAS en charge des personnes âgées, expliquant que cette idée est globalement partagée par l’ensemble de ses collègues. Elles redoutent des conditions de travail beaucoup plus difficiles et contraignantes, avec des horaires encore plus étendus, une mauvaise gestion des plannings ou encore de mauvais traitements.
Une autre mesure décriée par les syndicats est la fusion des ressources humaines du CCAS avec celles de la ville. « Avant, les RH étaient spécialisés et connaissaient nos problèmes, » indique une syndicaliste de Sud, « alors qu’avec cette décision, on va s’adresser à des personnes noyées dans nos demandes et qui ne les connaîtront pas vraiment. »
Cette mesure a d’ailleurs été adoptée au Conseil Municipal, avec l’abstention des écologistes. Le groupe Renouveau a voté contre, justifiant son opposition par le fait que ce vote intervient trop tôt, avant même les résultats de l’audit.